Le paradoxe est à la hauteur de la période que nous vivons : jamais l’idée de la quête du bonheur n’aura été aussi présente dans l’esprit collectif, aussi médiatisée, jusqu’à l’excès ; et pourtant, jamais peut-être, la société n’aura créé un système aussi propice à nous en tenir à distance, de ce bonheur.
Trois clés
Depuis la nuit des temps, philosophes, guides spirituels et autres sages de la vie humaine, qu’ils fussent retirés en méditation, connus du monde entier ou seulement du quartier qui entourait leur banc à l’ombre d’un tilleul, nous ont légué un riche héritage dans lequel je puise ceci : le chemin du bonheur est jalonné de trois fondamentaux, aussi incontournables l’un que l’autre.
Une certaine orientation positive
Il parait évident que voir davantage ce qui va bien, « le verre à moitié plein plutôt que le verre à moitié vide », comme le dit le vieux dicton, célébrer le beau, est de nature à nous mettre en joie. Porter un regard positif sur l’autre et sur soi-même, y compris ses erreurs, ses zones d’ombre, ses imperfections. Faire confiance à l’avenir et surtout à la Vie, qui est et demeurera plus forte que tout.
Au passage, l’optimisme permet de vivre plus vieux et – c’est bien plus important à mes yeux – en meilleure santé ; c’est aujourd’hui scientifiquement démontré (précision importante, au pays de Saint Descartes !)
Chercher le bonheur à l’intérieur, plutôt qu’à l’extérieur
Aucun objet extérieur ne peut générer le bonheur. Tout au plus, peut-il y contribuer ; encore faut-il que mon intérieur y soit réceptif. De même qu’une salade ne pousse pas dans du macadam, tout élément extérieur, qu’il soit matériel ou humain, ne trouvera d’écho véritable en moi que s’il y trouve un terreau propice, qui le magnifiera et le fera grandir à l’intérieur, avant de le rayonner vers l’extérieur.
Mais si ce « terreau intérieur » est inexistant, je tombe dans le piège d’une croyance erronée, qui m’amènera à confier aux éléments extérieurs l’inatteignable tache de combler ce qui me manque à l’intérieur.
Le bonheur, c’est maintenant… ou ce ne sera pas !
« Il n’y pas de chemin du bonheur, c’est le bonheur qui est le chemin », dit une magnifique et subtile pensée attribuée tantôt au Dalaï-Lama, tantôt au Bouddha lui-même ; en tout cas, au patrimoine de l’humanité. Comme elle est orientale, cette pensée qui se nourrit du paradoxe et de l’insaisissable ! Comme elle se joue du raisonnement linéaire et simpliste ! Ainsi donc, le bonheur n’étant pas au bout du chemin, mais le chemin lui-même, je dois m’y placer... pour y être. Fichtre…
Dit plus prosaïquement, au risque d’être réducteur, le bonheur implique de jouir de ce que nous avons, de ce que nous sommes, plutôt que de rêver que nous nous sentirons tellement mieux lorsque… (à compléter selon ses affinités personnelles…), ce qui nous place dans le cercle vicieux du « toujours plus », ou « toujours autre chose ». Une quête sans fin.
Le modèle occidental s’accroche viscéralement aux trois anti-clés du bonheur
Une orientation clairement négative
Est-il seulement imaginable de se sentir en joie, après avoir vu ou écouté les informations du jour ? Nous sommes abreuvés de ce qu’on a appelle des « nouvelles » (drôle de mot : c’est toujours la même chose !), plus déprimantes les unes que les autres. Une sorte de célébration de ce qui ne va pas, ce qui a tendance à pomper notre énergie et à nous remplir de peur. Nous subissons même actuellement, dans l’hexagone, ce qui s’appelle le « France bashing », à savoir le dénigrement systématique de tout ce qui s’y passe, de tout ce qui y vit. Comme si nous en avions besoin : nous sommes déjà les champions du monde du pessimisme !
Je vois dans cette tradition morbide une habitude auto-organisée du système, pour nous maintenir dans la peur. Quand on a peur, on se recroqueville, on n’ose pas. Quand on a peur, tout saut vers l’inconnu effraie. Quand on a peur, on préfère la présence rassurante de notre petit confort à l’incertitude de tout changement, quand bien même saurions-nous celui-ci inévitable. Bref quand on a peur, on ne voit pas plus loin que le bout de son nez. On est manipulable. Ainsi le système peut-il se maintenir.
Le mythe du bonheur par l’extérieur
Evidemment, cette croyance n’est pas exprimée ouvertement, mais présente en filigrane de notre société du jetable : nous serons tellement mieux quand nous possèderons cette nouvelle voiture, ce barbecue qui coûte le prix d’une voiture dans un pays africain, quand nous aurons pu affubler chacune de nos chères têtes blondes d’un écran plat dans sa chambre et d’un téléphone mobile dans sa poche, que nous aurons la certitude de partir en vacances en été et aussi au ski, mais-ce-serait-bien-aussi-un-ou-deux-week-ends prolongés-et-pourquoi-pas-quelques-RTT, tout en plaçant de l’argent sur un compte épargne retraite, une retraite que nous passerons dans un appartement au bord de la mer, appartement que nous transmettrons ensuite aux mêmes têtes blondes…
Notre troubadour national, Alain Souchon, chantait déjà il y a un certain temps : « on nous fait croire… que le bonheur c’est d’avoir… d’en avoir plein nos armoires… dérision de nous, dérisoire… car foule sentimentale, on a soif d’idéal… attirés par les étoiles, les voiles… que des choses pas commerciales… »
Les choses ont encore empiré, depuis. Noyée sous une avalanche de tentations, repue à ne même pas s’en rendre compte, capable de s’endetter sur plusieurs vies pour obéir à une injonction, notre société consomme… pour consommer.
La promesse du bonheur… plus tard !
Conséquence évidente : tant que nous demeurons dans cette logique, nous sommes englués, nous ne pouvons accéder au bonheur. La société de surconsommation nous met des bâtons dans les roues, et on peut la comprendre : imaginez qu’une majorité de citoyens se rendent compte qu’ils sont plus heureux à cultiver leur jardin qu’à consommer et posséder, qu’ils peuvent se sentir mieux avec moins, en meilleure santé avec très peu de chimie… à qui cela rapporterait-il ? Comment le système en place pourrait-il se maintenir ?
Nous devons donc en changer !
La conclusion s’impose. Outre la donnée la plus incontournable – l’épuisement de la Terre, notre mère à tous - s’ajoute donc un autre argument de poids, militant pour l’invention d’une nouvelle société : nous permettre d’être plus heureux.
Cinq années se sont écoulées depuis septembre 2008 et pourtant, nos « élites », de gauche comme de droite, n’ont toujours pas compris que nous ne sommes plus dans une crise économique (sous-entendu, dont nous allons sortir), mais en mutation. Une image m’apparaît : des poulets fous, courant, voletant et dont la tête à moitié tranchée, caquetterait désespérément : « consommez, consommez ! Nous avons besoin de croissance ! ». Cette absence de vision et de sens de la part de nos dirigeants m’apparaît bien plus préoccupante que les scandales et affaires qui les conduisent à jouer quotidiennement les pompiers, gesticulant au milieu des incendies médiatiques plutôt que de travailler à un avenir désirable et soutenable, ce qui devrait être la priorité des priorités.
En l’absence de leaders porteurs d’une vision pour l’avenir, c’est à nous, citoyens, qu’il revient de nous prendre en mains et de changer le monde. Je me demande parfois si un cataclysme ou une révolution humaine ne seront pas nécessaires mais, comme je suis à la fois optimiste et non-violent, je préfère croire qu’une insurrection pacifique autour du bonheur est possible, munis de ces trois clés :
Haut les cœurs, pour la planète comme pour notre bonheur !
Un site réalisé par www.skiptojimdo.com
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Christian (dimanche, 14 avril 2013 23:12)
Le bonheur... Vaste sujet qui t'est cher, Fabien.
Ce mot, cette quête, ce rêve... génèrent diverses pistes de réflexion chez moi...
Je pense tout d'abord que le bonheur ne peut se vivre en accumulant les biens matériels dans cette société individualiste centrée sur la surconsommation superflue et le paraître. Ecraser les autres et amasser l'argent n'a jamais rendu heureux.
Vivre l'harmonie avec la planète, vivante, et tous les êtres vivants qui vivent sur la terre, c'est une approche du bonheur, me semble-t-il. Regarder la nature, écouter les oiseaux, câliner son chien, se baigner dans un ruisseau, enlacer un arbre, respirer l'air pur du haut de la montagne, se laisser bercer par les vagues de l'océan, observer les nuages, observer des enfants jouer, déguster un bon vin... cette liste est loin d'être exhaustive.
Savourer totalement l'instant présent, sans se perdre dans la rumination d'un passé irrattrapable, ni dans l'angoisse d'un hypothétique avenir, selon la méthode prônée par Eckart Tollé, est aussi une voie prometteuse. Non?
Appliquer les Accords Toltèques de Don Miguel Ruiz, suivant la philosophie fort originale que ce chamane nous transmet, fruit d'une sagesse qui a traversé les siècles, offre une autre approche. Lisez donc ses livres et appliquez ces reconditionnements, vous serez surpris.
Ou bien pratiquez le Ho'oponopono sans modération, vous sentirez un allègement de vos soucis. Consultez le site de Nathalie Bodin, vous verrez la simplicité et la magie de la démarche...
Donner, sans attente de retour, spontanément, par générosité, sur un élan du Cœur, du temps, de l'écoute, un sourire, de l'argent, de l'aide..., voilà encore un autre chemin qui procure un sentiment de joie et de plénitude.
Positiver, en projetant le résultat positif que l'on espère, suivant la désormais fameuse "loi d'attraction", en chassant toute idée noire, et y croire, cela ne coûte rien et lorsque l'heureux dénouement survient, quelle joie de se sentir exaucé par l'Univers. Un vrai bonheur!
Sans oublier tous les petits plaisirs chers à Philippe Delerm, telle la première gorgée de bière bien fraîche lors d'une journée bien chaude... ces petites joies du quotidien que l'on ne savoure généralement pas assez, n'est-ce pas des miettes du sacro-saint bonheur dont les magazines nous rabattent les oreilles?
Le bonheur est-il un "Graal" inaccessible sur cette Terre, un état d'Etre absolu réservé à l'invisible, comme nous le décrivent les "expérienceurs" (néologisme de Jean-Jacques Charbonier) d'EMI dans leurs récits fascinants de l'après-mort?
Je crois qu'il y a une multitude de facettes au Bonheur, comme un énorme diamant qui brille de mille feux. Et que les moments heureux sont de plus en plus nombreux pour qui sait les accueillir.
L'harmonie intérieure, l'éveil du Cœur, la communion avec l'âme... la découverte de notre dimension divine (osons le mot) personnelle, l'expression de notre créativité... sont la Voie du Bonheur.
Le Bonheur n'est-il tout simplement pas synonyme du mot Amour?
Un mot tellement galvaudé, réduit, sali, alourdi, effrayant pour tous les "autistes" du Cœur...
Ou bien, prenons une autre approche: le Bonheur ne passe-t-il pas par l'application du troisième terme, souvent oublié, négligé, bafoué, de notre devise républicaine: la fraternité?
Une Humanité vraiment solidaire, où chacun de ses membres serait respectueux de la Vie et de ses Frères, de la planète, de la nature, des animaux... ne serait-elle pas dans un Bonheur paradisiaque?
Qu'attendons-nous?
Que tous les petits "colibris" s'attellent à "faire leur part" et l'utopie progressera sur le chemin de la réalité!
Ne crois-tu pas, mon cher Fabien, toi qui travailles à ré-enchanter nos vies?
Hélène (lundi, 15 avril 2013 08:32)
Et si tout simplement, nous nous permettons d'être heureux ? Chacun en est digne. Mais bien souvent, nous avons à nous défaire d'un carcan construit au fil du temps, dans lequel l'éducation judéo chrétienne joue un grand rôle. Et tous ces schémas hérités de génération en génération, toutes ces mémoires de notre généalogie et d'autres vies, toutes ces émotions stockées dans notre enfance et qui nous reviennent en effet boomerang plus tard, bien plus tard parfois. Les chemins indiqués par Christian sont des voies de libéralisation. Chacun sera sans doute guidé vers une voie (ou des voies) qui lui parle. Le champ du possible est ouvert. En fait, si vous souhaitez, décidez de vous offrir le bonheur, vous l'aurez car il est delà en latence en vous. Ca peut être si simple, si accessible. Pas besoin de mots complexes, d'un parcours du combattant (ce que j'ai suivi...sourire). Voulez le et il s'exprimera. Car il est déjà là.
Belle continuation et merci à Fabien de partager son cheminement,
Hélène L.
Fabien (mardi, 16 avril 2013 07:59)
Christian, Hélène,
Merci pour vos contributions, d'une telle richesse !
Je suis d'accord, de A à Z, avec toutes ces pistes de "contenus" de bonheur, Christian, et aussi ces magnifiques voies que sont la philosophie d'Eckhart Tollé, Ho'Oponopono...
Et ô combien en phase avec ta conclusion : le Bonheur ne serait-il pas tout simplement l'Amour... Les mots sont tellement réducteurs quant à ce qu'ils décrivent, mais aussi vis-à-vis de ce qui les relie entre eux...
Clin d'oeil à Delerm : et si le bonheur, c'était d'apprécier tout autant la dernière gorgée de bière que la première ?
J'aime aussi une pensée de Christophe André qui vient de m'être envoyée : "le bonheur, c'est la conscience du bien-être. C'est avoir conscience de ses instants de bien-être..."
Belle journée... heureuse !
Fabien Rodhain.
Hélène (mardi, 16 avril 2013 12:03)
Bonjour Fabien,
Ah ça l'amour... personne n'ose en parler... mais tout le monde en éprouve le même besoin. Surtout dans le monde du pro, où tout est si cloisonné bien souvent. Mais comment introduire toutes ces voies dans le monde du B to B, le hooponopono et autres ? Je tourne souvent cette question en moi ayant notamment pratiqué ce concept hawaïen auquel j'ai recours de tps en tps, notamment avant d'aller à un rdv ou une rencontre dans le cadre pro, pour que les échanges se déroulent au mieux. Il y a surement des portes d'entrée que j'ignore encore... car parler d'intelligence divine o due la vibration d'amour contenu dans le mot hooponopono, dans le monde du business trouverait-il une écoute ? Encore que j'observe une certaine évolution...j'ai déjà entendu des dirigeants dont celui d'une gde union de coopératives prononcer les mots "cerveau droit" et "cerveau gauche" , ces derniers mois... cela m'a bien interpellée.
Pour parler du bonheur, il s'agit de le vivre, d'en connaître l'état et chacun détient sa propre vérité en la matière. Qu'en pensez-vous ? C'est peut-être pour cela que nous avons du mal à mettre des mots dessus, à le définir. Et s'il est difficile à trouver, sans doute n'est-il pas à chercher ? Sourire. Et c'est comme toute chose, notre message passe mieux quand il s'appuie sur du vécu, un vécu conscientisé, car il porte en lui une certaine vibration.
Au plaisir de se relire,
Hélène
Christian (mardi, 16 avril 2013 19:43)
Merci Fabien et Hélène (étymologiquement "éclat du soleil") pour cet échange. Chacun apporte son approche, sa sensibilité, ses doutes et ses espérances.
Cette semaine, j'ai le grand Bonheur (avec un grand "B") de suivre une formation en thérapîe énergétique avec Luc Bodin, quel dépaysement et quel plaisir de travailler sur l'essentiel: notre nature énergétique. Avec l'énergie, "no limit" comme dit Luc.
Effectivement aucune limite à la guidance, à l'harmonisation de nos flux de Vie, à la communion entre les individus.
Un beau travail sur soi qui débouche sur les autres.
Un retour au potentiel illimité de l'être humain à enchanter sa vie dès l'instant où il connecte son Essence divine (ce dernier terme n'engage que moi, remplacez-le par "universelle", "cosmique", "lumineuse"... selon vos croyances).
Le Bonheur, pour moi, c'est la Joie de se sentir sur son chemin d'évolution, à sa juste place, ouvert aux autres et à la Vie, utile et dans l'Amour (inconditionnel et illimité). Demandez-le et vous serez surpris des changements qui interviendront dans votre existence.
Fraternellement,
Christian
Héléne (jeudi, 18 avril 2013 07:32)
Bonjour Christian et Fabien
Merci également à vous pour ces échanges. Et oui, je suis la fille du soleil. Sourire. Je veux partir vivre au soleil...alors que... Je suis en quete aussi de qq chose qui est en fait déjà là. A ce jour, j'ai la peur, mére de toutes nos peurs je pense, de la mort. Qq soucis de santé et hop ca mentalise. Mais j'ai surement celà à vivre dans les tps présents de transformation. Les énergies qui nous tombent dessus (facon de parler) secouent qq peu.
Ravie pour toi Christian que tu suives cet enseignement. Avoir conscience que nous sommes sans limite et que nos pensées influencent notre vibration donc nos relations à nous et notre environnement. Es tu toi meme "formateur" ou plutot enseignant?
J'ai à vous quitter ici. A un prochain échange. Belle continuation.
Fabien (jeudi, 18 avril 2013 10:48)
Hélène,
Drôle de coïncidence, si tant est que cela existe : je rentre d'un déplacement... dans une très grosse coopérative française ! Par ailleurs, je réfléchis en ce moment justement, à la manière d'introduire ces pratiques dans l'entreprise.
"Pour parler du bonheur, il s'agit de le vivre, d'en connaître l'état et chacun détient sa propre vérité en la matière. Qu'en pensez-vous ?" : je suis bien d'accord. Si je me permets d'énoncer trois clés, c'est parce que je considère (peut-être à tort ?) qu'elles sont autant de conditions sine qua non d'accès au bonheur d'une part, et que la "société du gaspillage" sabote intrinsèquement ces trois conditions, car cette société est bâtie sur ses trois "anti-clés". Chacun détient sa vérité en matière de bonheur, j'en conviens à 100%... simplement, il me semble que quelle que soit cette vérité, elle sera difficile à atteindre pour des personnes orientées essentiellement vers le négatif, ou qui cherchent exclusivement ce bonheur à l'extérieur d'eux, ou encore qui sont armées de la croyance "je serai heureux, quand...".
Christian, d'ailleurs, parle de son Bonheur par le chemin d'évolution, qui est bien une quête intérieure.... En ce qui me concerne, j'évoquerais volontiers une sorte de joie intérieure que, bien sûr, je suis seul à pouvoir définir.
Quel chouette échange ! Merci à tous les deux,
Fabien.